... à plusieurs titres.

Qu'est-ce que l'obligation de résultat

Contrairement à ce qu'on pourrait croire en première lecture, l'obligation de résultat n'est pas une obligation d'atteindre un résultat : à l'impossible nul n'est tenu. L'obligation en question (et sa soeur, l'obligation de moyens) n'a pour effet que de définir dans quelles conditions la responsabilité légale du fournisseur peut être engagée ou pas, ce qui détermine la possibilité, ou pas, d'en obtenir une réparation financière en cas de non fourniture du service.

L'obligation de moyens veut que la responsabilité soit dégagée dès lors que le fournisseur a mis en oeuvre les moyens à sa disposition pour fournir le service, que ces moyens aient été efficaces ou pas. L'obligation de résultat, elle, interdit tout dégagement de responsabilité.

Mais les FAI ont une obligation légale de résultat, non ?

Oui... et non. Le texte de loi concerné est l'article L.121-20-3 du Code de la Consommation, qui dit que Le professionnel est responsable de plein droit à l'égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.. Noter qu'il n'est pas dit explicitement "obligation de résultat" : c'est implicite dans l'expression "responsable de plein droit", qui signifie que la responsabilité est automatiquement établie par la loi. Cependant, la dite loi poursuit et précise que Toutefois, il peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable, soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure.. Cela laisse des possibilités d'exonération.

Bon, et dans les cas décrits par Légalis, le FAI était responsable ou pas ?

... ça dépend.

Les deux premiers jugements, de Lavaur et de Juvisy-sur-Orge ont appliqué la loi au pied de la lettre, en particulier à Lavaur, où le juge a articulé les deux points de la loi : oui, Free est responsable de plein droit, donc il doit dédommager ; et par ailleurs, il peut se retourner contre France Telecom si ce dernier est la cause de l'interruption du service.

Le troisième jugement, de Bordeaux, de adopte une approche intéressante : il limite l'obligation de résultat, et la responsabilité qui en découle, à ce dont Free a la maîtrise, et en exclut les opérations qui relèvent de France Telecom, sur lesquelles le FAI n'a pas de prise, qui ne relèvent que d'une obligation de moyens.

Le quatrième, de Mont-de-Marsan, n'est pas réellement technologique, mais il est l'occasion de rappeler ce qu'on oublie parfois de l'article L.121-20-3 : si la mauvaise exécution du contrat est imputable au client, alors le fournisseur n'est pas responsable ; et le tribunal a jugé que cela ne se limitait pas aux pannes dont la cause est de sa responsabilité : cela couvre aussi les manques de coopération dans la résolution de la panne. Le fournisseur est certes responsable et doit agir, mais le consommateur ne peut pas se laver les mains de toute coopération.

En résumé ?

En résumé, un seul article de loi, deux analyses différentes et contradictoires : dans l'un, la responsabilité du FAI ADSL est absolue ; dans l'autre, au contraire, elle est limitée. A tout le moins, les observateurs peuvent ainsi réaliser que ce qui semble acquis au consommateur normalement attentif sur ses droits et sur les devoirs du fournisseur n'est pas aussi évident que cela. Un détail : les quatre jugements sont de proximité, donc en dernier ressort, et ne peuvent faire l'objet que d'une cassation : ça tombe bien, puisque la cassation porterait sur l'application de la loi et non sur les faits eux-même, et la Cour se pencherait alors sur l'interprétation à donner au L.121-20-3, ce qui pourrait donner lieu à une homogénéisation.