Avertissement : ce qui suit est mon analyse, fondée sur les textes et les jurisprudences que j'ai cherchées et trouvées durant la rédaction de ce billet. Si vous pensez que j'ai tort, dites pourquoi en commentaire, en renvoyant aux jurisprudences et aux textes qui soutiennent votre propos. J'annoterai l'article d'un coup du stylo bleu de l'éditeur pour renvoyer aux commentaires que j'estimerai judicieux.

Le système d'exploitation de mon ordinateur est mis à jour régulièrement. J'ai complètement remis à jour moi-même mon routeur. Mon camescope peut sûrement être mis à jour. Mon téléviseur a déjà fait l'objet d'une mise à jour de son micrologiciel en SAV. Et je surveille mon frigo avec attention, des fois qu'un clignotement de ses loupiotes ne conduise son manuel d'entretien à me conseiller, aussi, une mise à jour.

Aujourd'hui, ces mises à jour n'étonnent plus personne. Mieux : elles sont des arguments commerciaux. Les mises à jour garantissent la capacité d'évolution du produit, assurent la résolution des problèmes éventuels... Les constructeurs publient ces mises à jour à côté des manuels utilisateurs et des éventuels drivers Windows (voire des drivers Linux dans certains moments d'égarement).

Une mise à jour logicielle est devenue une intervention sur le produit comme une autre, un remplacement d'une pièce qu'est le logiciel. Juridiquement, l'acte n'est pas différent de celui de remplacer une courroie[1]. C'est une modification du produit, et ça n'a pas de raisons d'être considéré différemment des autres. On va donc retrouver pour ces mises à jour la même situation qu'avec les interventions matérielles : certaines modification peuvent annuler la garantie (modulo les vices cachés, voir plus loin) si elle court encore ; d'autre peuvent prolonger celle-ci ou en entraîner une nouvelle.

Il arrive qu'un constructeur publie une mise à jour spontanément, parce que son produit a un défaut de fonctionnement plus ou moins rédhibitoire à l'usage, ou présente un risque que cette mise à jour viendra éliminer. Surtout si elle élimine un risque, une mise à jour officielle est assimilable à un acte de rappel spontané. Cette mise à jour peut même s'analyser en une exécution de la garantie contre les vices cachés : jusqu'à la publication de cette mise à jour, le défaut existait ; l'acheteur peut donc aisément démontrer que ledit défaut était déjà présent à l'achat puisque présent dans toutes les versions du logiciel avant la dite mise à jour. De même, si un produit qui n'est plus sous garantie cesse de fonctionner à la suite d'une mise à jour publiée par le constructeur, la défaillance peut être considérée comme de la responsabilité du constructeur, sauf à ce qu'il ait explicitement exclu ce cas de figure dans les garanties associées à la mise à jour[2].

On peut aussi se voir suggérer une mise à jour lors d'une demande de SAV sur un produit défaillant ; dans ce cas, il s'agit d'une action de réparation. Et comme les autres actions de réparation, une mise à jour en SAV devrait prolonger la garantie du délai écoulé entre la constatation de la défaillance et sa résolution, si du moins la garantie le prévoit pour les autres pièces.

Il peut exister aussi des "mises à jour" qui ne viennent pas du constructeur. Par exemple, des routeurs[3] ou des disques réseau [4] peuvent recevoir des firmwares alternatifs ; assimilables à des pièces de rechange non officielles, ces mises à jour tierces peuvent annuler la garantie -- mais pas toujours : certains produits sont vendus à fin d'être équipés du logiciel du choix de l'utilisateur[5], et l'usage de mises à jour alternatives sur ces produits n'en annule donc pas la garantie.

Un dernier point concerne le dispositif de mise à jour. Dès lors qu'un produit prévoit des mises à jour, si son dispositif de mise à jour ui-même se révèle défaillant et empêche leur utilisateur d'appliquer des mises à jour officielles (et tierces quand cette option est possible) ou pire, rend le produit inutilisable, alors cette défaillance du système de mise à jour est un vice caché, présent dès l'achat du produit même s'il ne s'est révélé que plus tard. On peut donc faire jouer la garantie en vice caché même si la garantie constructeur était révolue. Et des problèmes de ce type n'arrivent pas qu'aux autres.

Il faut noter cependant que si l'on a un système qui fonctionnait à la livraison et qu'à l'occasion de la mise à jour un élément, ce système cesse de bien fonctionner, alors l'installateur original du système n'est pas responsable : on devra diagnostiquer le système et déterminer l'élément qui n'est plus conforme (et ce peut être celui mis à jour... ou un autre, dont le défaut était jusqu'ici caché) et se retourner vers son fabricant si du moins une garantie s'applique encore.

Pour finir, évoquons un cas spécifique : celui des appareils en dépôt comme la Freebox : ces appareils ne sont pas la propriété de leur utilisateur, et leurs mises à jour sont décidées par leur propriétaire, Free. En vertu de quoi, l'utilisateur, même (et d'autant plus) s'il est incité à appliquer les mises à jour quand elles sont disposibles, ne peut être tenu pour responsable des conséquences de ces mises à jour : si d'aventure une telle mise à jour rendait la freebox définitivement inutilisable, la responsabilité en reviendra alors entièrement à Free.

Notes

[1] Note aux lecteurs de moins de 30 ans : c'est comme un gros élastique qu'on met autour de deux poulies pour que l'une entraîne l'autre.

[2] D'où l'importance de toujours lire les conditions d'utilisation et autres licences

[3] tels que les WRT54 de Cicso (anciennement Linksys)

[4] tels que l'ED Mini V2 de LaCie

[5] Par exemple la Kurobox